En marchant de Neuvic à Saint-Géry

Deuxième étape de ce retour au chemin : un peu moins de trente kilomètres pour aller de Neuvic à Saint-Géry ou plutôt à La Gratade, un lieu dit rattaché à Saint-Géry mais qui, pour mon malheur, en est assez éloigné.

Je me réveille dans l’ambiance délicieuse de l’heure bleue, qu’on ne perçoit vraiment que lorsque l’on dort sous la tente, quand une très fine paroi vous sépare du chant des oiseaux.

Il a plu et ce que j’avais lavé et mis à sécher est plus mouillé encore que ça ne l’était la veille au soir mais je pars, traversant l’Isle et arrive au bourg de Neuvic.

Coup d’oeil à l’église dont le mur de facade recèle un bas-relief très usé ; tour d’une fontaine affichant des têtes de boeuf et de mouton ; puis je m’attable à un café pour y prendre un crème, au soleil. Un autre client, qui a acheté des pains au chocolat, m’en offre gentiment un.

En sortant de Neuvic, avant de traverser à nouveau l’Isle, on longe un étang à coté duquel ont été reconstruites, il y a quelques années, des « maisons doubleaudes« , faites de torchis et de bois, comme c’était le cas des maisons traditionnelles de la forêt de la Double, où se trouve Neuvic.

Puis on traverse l’Isle, et une voie ferrée, avant d’arriver à Douzillac.

L’église de Douzillac, romane à l’origine, a été très refaite. Elle a un un joli bas-relief en bois de Jean-Baptiste baptisant Jésus et possède une de ces innombrables statues de Jeanne, heureusement pas trop martiale. Elle possède également un lustre qui rappelle ceux dessinés et construits par Abadie pour la cathédrale Saint-Front de Périgueux.

A la sortie du village, une fontaine. Puis l’on entre à nouveau dans la forêt qu’illuminent, çà et là, les branches de genêt.

Le soleil perçant les nuages, je fais une pause pour faire un peu sécher ma tente toute mouillée encore de la pluie de la nuit. À cet endroit, le chemin, assez rectiligne, est fait de gros galets burinés. C’est un des quelques lieux où l’on se dit que l’on marche peut-être sur le tracé ancestral, et que celui-ci emprunte peut-être l’itinéraire d’une voie romaine plus antique encore. Mais c’est sans certitude.

Et partout, en sus du genêt, des fraisiers.

Traversée du petit village tranquille de Saint-Louis-en-l’Isle, puis traversée de l’Isle pour arriver à Sourzac, avec son église Saint-Pierre-et-Saint-Paul, qui domine le fleuve et fait face à une source et à des grottes où veillent des statues.

Là, on prend un chemin qui monte droit dans la pente.

Puis c’est l’arrivée à Mussidan, en passant devant l’église Saint-Georges, qui n’est pas jolie (elle a été construite par Abadie, le refaiseur de Saint-Front) mais qui est ouverte et renferme une belle Pietà dont le Christ porte des bras et des mains démesurées. Et Jeanne guerrière, comme toujours.

Traversée de Mussidan, ensuite, qui me cause une grande déception. À la sonorité du nom, j’imaginais une bourgade mignonne ; je découvre une petite ville plutôt grise et morne. Mais sans doute le temps maussade y est-il pour quelque chose.

La sortie de la ville est pénible parce que l’autoroute A89 passe au sud de Mussidan et qu’il faut, pour la traverser sous un tunnel, faire un long détour.

Une fois l’autoroute franchie, le chemin devient plus agréable, notamment parce que c’est un vrai chemin coupant à travers la forêt.

Traversée de Saint-Géry, alors que la pluie menace ; et tandis que je m’arrête, ayant passé le village, pour revêtir mes habits de pluie parce que celle-ci tombe dru, une voiture s’arrête dont le conducteur me demande si je suis Bernard. C’est mon hôte, qui inquiet de l’heure, est venu à ma rencontre.

C’est en voiture que je franchis les deux kilomètres qui me séparaient encore de La Gratade, le hameau où M. et Mme Villaud tiennent avec une grande gentillesse un gîte où j’arrive bientôt, m’installe et dîne délicieusement avant de m’endormir.